III
LE PIÈGE

Les jours, les semaines s’écoulaient. Bolitho avait l’impression qu’il n’y avait pas de limite à la cruauté des vents et de la mer. Le monde entier semblait s’être réduit aux dimensions étroites de la coque du navire et du pont que balayaient les lames. Les ordres du commodore continuaient d’affluer. Jour après jour, les trois bâtiments tiraient bord sur bord par tous les temps dans le golfe de Gascogne. En quelques minutes, de simples rafales de vent se gonflaient de toute la force des tempêtes océaniques, et, alors que les matelots regagnaient les hauts à grand-peine pour se battre contre les voiles glacées, durcies par le gel, garder son poste devenait un cauchemar. Pendant des journées entières, les trois navires étalèrent la tempête, toutes voiles carguées, et lorsque la visibilité revenait, une succession de signaux urgents en provenance de l’Indomitable leur enjoignait de reprendre la formation ; et tout recommençait.

Plus personne, à bord de l’Hyperion, ne souffrait du mal de mer. Quand, pour de courts instants, les hommes étaient libérés de leur tâche sur le pont, ils s’effondraient comme morts dans leur étroit hamac. Leur seule consolation était alors la chaleur des autres corps qui se balançaient autour d’eux, le navire taillant sa route à travers les violents courants côtiers et les hurlements du vent.

Mais une heure à peine semblait s’être écoulée que déjà le sifflet strident du bosco retentissait, et le cri : « En haut tout le monde ! Dans la mâture à carguer la voile ! » était relayé d’écoutille en écoutille. Pour éviter que les hommes ne s’abandonnent totalement au désespoir, Bolitho saisissait la moindre occasion de les occuper. L’exercice au canon était conduit chaque fois que possible, avec la bordée tribord opposée à la bordée bâbord. Les canonniers de la batterie basse furent forcés d’utiliser le pont principal car, en raison du mauvais temps, on ne pouvait ouvrir les sabords inférieurs.

Lorsque Bolitho effectuait ses rituelles inspections hebdomadaires, les misérables conditions de vie des hommes dans la batterie basse, confinés entre les trente pièces de vingt-quatre, le consternaient. Les sabords condamnés et le violent mouvement de roulis du navire faisaient de cet espace un véritable enfer. Quelque trois cents matelots vivaient, mangeaient et dormaient là, et même en l’absence des hommes de quart, l’atmosphère était irrespirable. La puanteur repoussante des bouchains, mêlée au remugle de cette humanité entassée et à l’odeur des vêtements qui ne parvenaient jamais à sécher, était insupportable, même pour le plus endurci des marins.

Trois semaines après leur passage sous le commandement de Pelham-Martin, un homme se noya, un jeune matelot du Devon qui avait été enrôlé de force. Il travaillait sur le gaillard d’avant, sous la direction du bosco, lorsqu’une immense lame s’était élevée au-dessus du beaupré et l’avait projeté par-dessus le bastingage comme un fétu de paille. Il avait réussi à s’agripper aux filets un court instant, mais une autre déferlante l’avait arraché et entraîné dans un dernier cri.

Lorsque l’accident s’était produit, le vent soufflait en tempête et il était alors impossible de virer sans risquer de démâter. De toute façon, cela n’y aurait rien changé. Le temps qu’une embarcation eût pu pousser du navire, toute chance de retrouver le malheureux dans les flots déchaînés se serait évanouie. Mais l’incident souleva une vive émotion à bord, que même le fatalisme d’hommes plus blasés ne put dissiper.

C’était le premier mort parmi l’équipage depuis le départ de Plymouth et, outre le temps qui contraignait le navire à ne compter que sur lui-même, une menace semblait flotter au-dessus des ponts surpeuplés. Une atmosphère semblable avait régné la première fois qu’on avait dû fouetter un matelot. Le marin avait réussi à s’introduire dans la réserve à alcools et, sans en souffler mot à ses compagnons, s’était déniché un coin tranquille au plus profond du navire où il s’était saoulé à mort. Il était ressorti durant le premier quart, complètement nu, et avait erré dans l’obscurité du pont, tel un fantôme pris de folie, injuriant et insultant quiconque essayait de le contenir. Il était même allé jusqu’à assommer un officier marinier avant que les autres réussissent à le maîtriser.

Le jour suivant, alors que le navire peinait lourdement dans un grain, Bolitho avait fait rassembler l’équipage sur l’arrière afin qu’il fût témoin du châtiment et, après lecture du « Règlement de discipline en temps de guerre », avait donné l’ordre aux quartiers-maîtres d’infliger les trente coups de fouet. Tout bien considéré, c’était une punition légère au vu du strict code de discipline de la Navy. S’introduire dans la réserve à alcools était une faute grave, mais frapper un officier était passible de la cour martiale et de la pendaison, et chacun ne le savait que trop.

Se contenter de la punition la plus légère n’avait en rien amélioré les sentiments de Bolitho. Bien que l’officier marinier eût laissé entendre que le gaillard n’avait pas été frappé trop fort, les coups avaient bel et bien été administrés. En mille occasions, les châtiments s’avéraient indispensables. Mais, tandis qu’il se tenait près du bastingage avec ses officiers et que le chat-à-neuf-queues sifflait et claquait sur le dos nu du matelot, il se prit à songer que le navire tout entier avait bien assez à endurer sans devoir subir de souffrances supplémentaires. La pluie battante avait rendu la scène plus sinistre encore : les hommes assemblés sur le pont se serraient les uns contre les autres pour se réchauffer, la ligne écarlate des fusiliers ondulait sous les coups de roulis, et le corps de l’homme se tordait de douleur, les bras en croix sur le caillebotis, haletant et sanglotant tandis que le fouet se levait et retombait au rythme du tambour.

De temps à autre, un sloop rejoignait l’escadre, apportant des ordres de la flotte ou du ravitaillement en provenance de Vigo. Quand le temps le permettait, le commodore appelait ses trois commandants à bord du vaisseau amiral ; il leur lisait à voix haute ses rapports avant d’y apposer sa signature, puis demandait à chacun – à la grande surprise de Bolitho – de les contresigner. C’était la première fois qu’il observait cette pratique, mais il pouvait lire sur les visages impassibles de ses deux compagnons qu’ils étaient habitués aux étranges lubies de Pelham-Martin. Une chose devenait de plus en plus évidente : le commodore voulait se prémunir contre toute critique ou tout mécontentement du vice-amiral en impliquant ses trois commandants dans chacune de ses décisions. Jusque-là bien sûr, il n’avait rien fait, sinon obéir à ses ordres à la lettre ; patrouille et blocus, et rien d’autre.

Chaque fois que Bolitho était mandé à bord de l’Indomitable, Pelham-Martin se révélait un hôte plus que généreux. Les sloops qui faisaient la navette avec Vigo lui permettaient apparemment de ne jamais manquer de vins de qualité et, ce qui était plus important encore aux yeux de Bolitho, de rester en liaison avec le monde extérieur.

Le jour de Noël fut l’occasion de la dernière visite de Bolitho sur le vaisseau amiral. Fait curieux, une légère brise de noroît se mit à souffler et les flots agités de l’océan se muèrent en une houle longue et maussade. Le pont supérieur de l’Hyperion fut bientôt envahi d’hommes qui fixaient les eaux grises et les autres navires comme s’ils les voyaient pour la première fois. Ce qui était peut-être le cas, la mer n’ayant jamais été calme plus d’une heure durant au cours des huit semaines qui s’étaient écoulées depuis qu’ils s’étaient rangés sous les ordres de Pelham-Martin.

Bolitho était irrité d’avoir à se rendre sur le vaisseau amiral. Dans les conditions qui régnaient alors, Noël serait assez lugubre pour ses hommes sans avoir à y ajouter son départ pour la table somptueuse du commodore. Il y avait bien longtemps que l’Hyperion avait épuisé ses vivres frais. En guise de festin, les hommes du pont inférieur n’auraient droit qu’à une étrange concoction de hachis de bœuf généreusement arrosé de rhum, et d’un pudding aux raisins au goût bizarre, dont Gilpin, l’affreux cuisinier borgne, assura à Bolitho « qu'ils lui en diraient des nouvelles ».

Bolitho n’ignorait cependant pas que la bonne chère n’était pas la seule raison de sa venue sur le vaisseau amiral. Dès l’aube, un sloop était apparu et, porté par une brise légère, s’était rapidement approché des lourds deux-ponts, tel un roquet tournant autour d’énormes bovins. Ce n’était pas un des sloops de Pelham-Martin : il dépendait de l’escadre principale qui croisait au large de Lorient. Quand Bolitho eut revêtu son habit et quitté le navire à bord de son canot, il vit que la chaloupe du sloop avait déjà accosté le vaisseau amiral.

Une fois à bord de l’Indomitable, il trouva Pelham-Martin d’excellente humeur. Dans la grande cabine, Winstanley arborait un visage de marbre et le commandant Fitzmaurice de l'Hermes semblait atterré. Les nouvelles de Lorient étaient inquiétantes. Le vice-amiral Cavendish avait détaché deux frégates avec pour mission de patrouiller le long de la côte et d’observer tout mouvement parmi le grand nombre de navires ancrés dans le port. C’était une tâche de routine, dont les deux commandants avaient tout à fait l’habitude. Mais, alors qu’ils s’approchaient de la rive, les vigies leur avaient signalé un changement d’importance : les navires de ligne français, au lieu d’être rangés comme d’habitude, avaient leurs vergues brassées et, de toute évidence, étaient moins nombreux. Sans aucun doute, certains avaient réussi à forcer le blocus.

Le commandant du sloop ne semblait guère disposé à commenter plus avant cette nouvelle, mais Pelham-Martin insista pour qu’il prenne un peu de cognac. La langue ainsi déliée, le jeune officier raconta au commodore que, les deux frégates avaient à la fin bien failli être écrasées par quatre navires français qui, apparemment, avaient surgi de Belle-Ile et étaient presque parvenus à prendre les deux éclaireurs sous le vent de la terre. Pelham-Martin en pleurait de rire :

— Vous voyez, Bolitho, je vous l’avais bien dit, que cela se produirait ! Une telle stratégie n’est pas adaptée à un blocus. Patience et démonstration de force sont tout ce dont nous avons besoin.

Bolitho garda son calme :

— Le sloop apporte-t-il quelque nouvel ordre, commodore ?

Pelham-Martin continuait de pouffer. Il n’eût pas ressenti, semblait-il, plus de plaisir si la flotte avait remporté une grande victoire, alors qu’en fait son vieil ennemi avait permis aux Français de prendre la mer sans être découverts.

— Sir Manley Cavendish, dit-il entre deux gloussements, réclame un rapport complet sur les navires de guerre français dans cette zone, ainsi que sur leur état de préparation, et le reste.

Il annonça cela sur un ton si banal que Bolitho pensa un instant que quelque chose lui avait échappé. Mais le visage sinistre de Fitzmaurice lui indiqua qu’il n’en était rien.

Pelham-Martin posa une main sur le bras de Bolitho :

— N’ayez crainte, nous enverrons un rapport en temps utile.

Il pencha sa petite tête de côté et sourit doucement :

— Vous pouvez vous rapprocher des côtes demain, Bolitho, et établir le contact avec l’Ithuriel. Cela vous agrée-t-il ?

Le commodore avait prévu un somptueux repas dans sa cabine pour les trois commandants, mais au préalable il rédigea un court message que le sloop devait porter au vice-amiral Cavendish. Il avait manifestement eu la tentation de l’assortir d’une petite touche d’ironie amère, mais s’en était gardé, sachant que ce serait interprété pour ce que c’était, un pied de nez manifeste aux malheurs de Cavendish.

Durant tout le repas, Bolitho fulmina : il n’y avait pas de temps à perdre. Il devait y avoir des navires près des bouches de la Gironde : belle occasion de tenter une action ! S’il ne rencontrait rien d’intéressant, il pourrait au moins en profiter pour sortir des griffes de Pelham-Martin, explorer plus avant la côte et, à défaut d’autre chose, ramener éventuellement quelques informations.

Pelham-Martin avait à l’évidence de solides relations, songeait-il. Tout au long du dîner, il n’avait cessé de lancer les noms et les titres des personnages qu’il connaissait, de faire mention des affaires de la Cour ou du Parlement. Même si seulement la moitié de ce qu’il disait était vrai, Bolitho ne s’étonnait plus que Pelham-Martin eût pu survivre à l’hostilité de son amiral.

Sa façon de simplifier ou d’ignorer les dangers que pouvait engendrer le rassemblement des navires français ne manquait pas de légèreté, mais elle n’étouffait pas ce je ne sais quoi qui le rendait presque sympathique. Il avait fait venir de Vigo, sur ses propres deniers, suffisamment de fruits frais pour régaler chaque homme à bord des trois navires placés sous son commandement.

Bolitho, tout en pelant une orange, écoutait d’une oreille distraite Fitzmaurice raconter à nouveau par le menu les derniers instants de la victoire de Howe, le Premier Juin ; il songeait à Falmouth et se demandait si Cheney pensait à lui… si la vieille maison grise était couverte de neige… si son enfant serait un garçon ou une fille. Peu lui importait d’ailleurs, pourvu que sa femme fût heureuse.

La soirée s’achevait enfin, et Bolitho s’empressa de regagner son bord. Le navire semblait particulièrement calme, et, à l’exception du quart, le pont principal était désert. Le seul signe de gaieté provenait du carré où une profonde voix de basse, qui ne pouvait appartenir qu’à Gossett, entonnait un chant sentimental très prisé des marins.

Inch se tenait sur le pont, prêt à accueillir son capitaine.

— La plupart des hommes ont rejoint leur hamac, commandant, dit-il en réponse à sa question.

Bolitho opina de la tête. Après des semaines d’épreuves, de souffrances et d’humidité, la bonne nourriture chaude et les rations supplémentaires d’alcool n’étaient certes pas suffisantes pour leur donner l’envie de célébrer plus longuement cette nuit de Noël.

— Bien, laissons-les en paix, monsieur Inch, jusqu’au prochain quart.

Il remarqua les traits tirés du lieutenant :

— Avez-vous pris un bon repas aujourd’hui ?

Inch eut l’air mal à l’aise :

— J’ai eu beaucoup à faire, commandant.

Bolitho l’examina d’un œil nouveau : de toute évidence, Inch ne se serait jamais joint aux autres officiers en son absence. Il imagina son second s’agitant et courant d’un pont à l’autre, s’assurant que tout était en ordre et donnant le meilleur de lui-même.

— Suivez-moi à l’arrière, monsieur Inch, dit-il abruptement.

Puis, se dirigeant vers la poupe, il ajouta :

— Nous quitterons l’escadre dès les premières lueurs de l’aube et prendrons contact avec l’Ithuriel.

Il fit un signe de tête à la sentinelle et précéda Inch dans sa cabine. Petch y dormait à poings fermés, recroquevillé contre la cloison. Bolitho sourit et déboucla son épée :

— Un verre avec moi, monsieur Inch ?

Le lieutenant retira son chapeau et le tint entre ses mains. Il observait la cabine, se rappelant sans doute le temps où il n’était que cinquième officier et où Bolitho avait pris le commandement du navire pour les mener de bataille en bataille. Soudain, il balbutia :

— Je… je me suis fiancé, commandant, lors de notre dernière escale à Plymouth.

Bolitho versa deux verres de bordeaux.

— Eh bien, buvons à votre bonheur, monsieur Inch.

Inch trempa ses lèvres puis leva son verre à la hauteur d’une lanterne.

— Son père est médecin, commandant ; c’est une personne très convenable, dit-il en hochant la tête. J’espère l’épouser à notre retour en Angleterre.

Bolitho détourna son regard. Il venait de se rappeler la place tenue par Inch dans sa vie depuis qu’il avait pris le commandement du vieil Hyperion. Quand il avait épousé Cheney, ne l’avait-il pas pris pour témoin ? Il se retourna et déclara d’un ton affable :

— Je vous souhaite beaucoup de succès. Voilà une nouvelle raison de bien faire et de gagner du galon.

Il lui adressa un large sourire.

— Que penseriez-vous d’avoir votre propre commandement ?

Inch baissa les yeux :

— Je… je l’espère, commandant.

Bolitho avait déjà suffisamment mangé et bu sur le vaisseau amiral, mais l’idée de rester seul, séparé du reste du bâtiment par la cloison et la sentinelle, lui était insupportable. Surtout pas cette nuit-là ! Il traversa la pièce et secoua son valet par l’épaule. Petch se leva avec quelque difficulté.

— Apporte-nous encore du bordeaux, et, pourquoi pas, de cet excellent fromage que mon épouse nous a fait parvenir.

— Elle pense à nous, ce soir, observa Inch.

Bolitho le regarda fixement sans mot dire. « Elle pense à nous… » Inch avait raison. Lui, plus que tout autre, devait se souvenir de l’importance que sa présence avait représentée pour l’Hyperion lorsqu’elle y avait embarqué… lorsqu’elle s’était occupée des blessés, alors qu’autour d’elle la bataille faisait rage.

— Je suis sûr qu’elle pense à nous, répondit posément Bolitho.

Laissant Petch s’activer autour de la table, Inch scrutait Bolitho, qui n’accordait pas même à ses paupières le temps de ciller de peur que quelque chose ne lui échappât. Il ne se souvenait pas de l’avoir jamais vu dans cet état. Il était assis sur le banc qui courait au-dessous des fenêtres et jouait d’un air absent avec la mèche de cheveux noirs qui, Inch le savait, dissimulait la cicatrice d’une vieille blessure. Bien que ses yeux fussent fixés sur Petch, il ne voyait rien. Il avait l’air sans défense. C’était comme s’il l’avait percé à jour, et Inch songea qu’il n’oublierait jamais cet instant-et qu’il n’en parlerait jamais.

 

Il faisait encore nuit noire quand l’équipage au complet fut rassemblé ; les huniers et les basses voiles gonflés par un vent modéré, l’Hyperion se sépara des deux autres bâtiments. Bolitho se tenait près du bastingage du gaillard d’arrière et regardait les matelots courir le long des vergues. Il se réjouissait de constater à quel point la liberté de mouvement accordée par Pelham-Martin avait changé l’atmosphère à bord de son navire. Pour la première fois depuis deux mois – depuis qu’ils avaient quitté le Sound de Plymouth –, il entendit les gabiers s’interpeller et plaisanter tout en s’activant dans la mâture. Les aspirants, d’une voix perçante, poussaient leurs hommes à se livrer à une compétition amicale mais dangereuse, jeu qui échappait aux regards des officiers car les silhouettes des gabiers se fondaient dans l’obscurité du ciel et parmi les voiles. Seuls quelques matelots affichaient une humeur maussade, mais Bolitho devina que c’était davantage dû à l’air glacé du matin succédant au repas bien arrosé de la veille qu’à un ressentiment diffus.

Il eut un frisson et se dirigea rapidement vers le compas qui, malgré le roulis, demeurait horizontal. A la faible lueur de la lampe d’habitacle, il put lire nord-nord-est. Avec un peu de chance, ils rejoindraient l’Ithuriel avant midi. S’il n’y avait rien à signaler, ils pourraient peut-être profiter de ce rare moment de liberté pour pousser plus au nord, au-delà de l’estuaire. Car, en dépit de l’apparente confiance du commodore, qui croyait que tout bâtiment tentant de forcer le blocus apparaîtrait nécessairement par le sud, où il avait en conséquence disposé ses deux autres frégates, Bolitho savait d’expérience que les Français n’étaient pas hommes à accepter une défaite sans réagir.

Inch le rejoignit et salua :

— Dois-je faire établir les perroquets, commandant ?

Lui aussi paraissait plus alerte. Bolitho fit non de la tête.

— Envoyez les hommes prendre leur déjeuner, monsieur Inch. Ils ont bien travaillé, j’imagine que cet air vif leur aura joliment ouvert l’appétit.

Une pensée lui traversa l’esprit : ce repas de porc salé et de biscuits durs comme du fer n’allait-il pas rendre malade la moitié de l’équipage ?

— Nous enverrons plus de toile quand il fera jour, poursuivit-il.

Il fit un signe de tête à Inch, puis se dirigea vers sa cabine.

Il jeta son manteau de mer élimé sur une chaise et s’assit à son bureau. Petch y avait disposé une assiette et du café fumant, et préparait le déjeuner de son maître dans l’office attenante. Même Petch semblait s’être fait à l’habitude de son capitaine de manger à son bureau plutôt qu’à la table prévue à cet effet.

Mais Bolitho aimait avant tout à s’asseoir devant les grandes baies vitrées, seul écran entre lui et la mer infinie. Parfois, fixant l’horizon jusqu’à l’oubli, il en arrivait à chasser de ses soucis le navire et son équipage. Ce n’était qu’une illusion, mais cela le réconfortait lorsqu’il en avait besoin. Aujourd’hui, il faisait encore trop sombre pour qu’on pût distinguer quoi que ce fût au-delà du sillage écumant surgissant de l’étambot. Mais il se sentait bien. Le navire vivait à nouveau, et c’était toujours mieux que de ne rien faire. Il prêta l’oreille aux bruits alentour : le grondement et les vibrations de l’appareil de gouverne, l’écoulement de l’eau le long de la muraille, et, dominant le tout, la plainte du vent à travers la mâture et les haubans lorsque le navire l’apprivoisait pour se pousser vers la terre invisible.

Petch déposa le petit déjeuner sur le bureau et fit un pas en arrière afin d’observer les réactions de Bolitho. Une tranche de porc gras panée, à peine frite, deux biscuits de mer généreusement tartinés d’une épaisse couche de mélasse noire, et du café. C’était un repas particulièrement spartiate pour le commandant d’un navire au service du roi, mais après la table généreuse de Pelham-Martin, il y avait dans cette nourriture quelque chose de rassurant : elle s’accordait aux circonstances.

Hélas, c’était bien trop beau pour durer. Plus tard, alors qu’il se promenait sur la dunette, tout en regardant l’équipage briquer le pont et les fusiliers marins se livrer à leurs mystérieuses cérémonies de maniement et d’inspection des armes, Bolitho eut le sentiment que tout avait changé.

— Le vent tourne, commandant ! s’exclama Gossett.

Bolitho regarda la flamme en tête de mât. Contrariant comme toujours, le vent dans le golfe de Gascogne venait de virer et était maintenant contre lui. Déjà, les huniers faseyaient et claquaient.

— Venir de deux points, la barre est-nord-est, ordonna-t-il.

Stepkyne, qui était officier de quart, donnait l’impression d’avoir beaucoup bu la veille.

— Aspirant de quart ! Appelez l’équipage à la manœuvre, et que ça saute !

Alors que le navire labourait la lame en venant au nouveau cap, Bolitho se rendit compte que cela ne suffirait pas. Le vent continuait à tourner et perdait en puissance. La flamme en tête de mât, habituellement horizontale, claquait et s’enroulait tel le fouet d’un cocher.

Gossett se glissa à ses côtés.

— Va falloir virer de bord, commandant, murmura-t-il en se frottant le menton. M’est avis que le vent soufflera de terre avant le changement de quart.

Bolitho le regarda avec attention. Gossett se trompait rarement en matière de temps.

— Très bien, amenez-le bâbord amures. Nous devrons remonter bien au nord de l’estuaire si nous voulons rejoindre l’Ithuriel aujourd’hui.

Il adressa un sourire à Gossett, mais intérieurement il était déçu et en colère. Le vent continuant de tourner, il savait qu’il n’y avait rien d’autre à faire. Lorsque la cloche piqua neuf heures, le vent s’était stabilisé au nord-est, à quelque quatre-vingt-dix degrés de sa direction initiale. Et, au lieu de naviguer confortablement vers un point d’où ils pourraient apercevoir la frégate et lui transmettre des signaux, ils durent péniblement remonter au nord de l’estuaire pour profiter du moindre souffle.

Inch traversa la passerelle et s’avança vers lui :

— Il nous faudra des heures avant de pouvoir à nouveau virer de bord, commandant.

Lui aussi semblait déçu. Bolitho écouta les vergues craquer et sentit le navire gîter lourdement alors qu’il s’élevait au vent ; ses voiles claquèrent et faseyèrent avant de se gonfler à nouveau pour l’aider à virer toujours plus.

— Nous rattraperons notre retard.

Puis, maîtrisant son irritation, il ajouta peu après :

— Voilà une excellente occasion d’entraîner la batterie basse, monsieur Inch.

Il gagna l’arrière du navire et regarda attentivement le compas. Nord-nord-ouest : oui, la batterie basse pourrait au moins pointer ses pièces sans se faire inonder par les sabords. Un peu d’air frais ne serait pas de trop pour chasser l’humidité et l’odeur fétide régnant dans les fonds.

Il leur fallut maintenir ce cap six heures durant, et le jour commençait à décliner quand l’Hyperion vira enfin cap au sud, toutes voiles dehors pour profiter de la légère brise de terre. Bolitho se tenait sur le bord au vent lorsque la vigie du nid-de-pie interrompit soudainement le cours de ses pensées.

— Ohé, en bas, une voile sur l’avant bâbord.

Bolitho jeta un regard à la flamme du grand mât. Il ne servait à rien de changer de cap. Cela les retarderait encore, et il ferait nuit noire avant une heure. Il passerait la frégate deux nautiques par son travers, et cela suffirait pour lire ses signaux. Il prit sa longue-vue et scruta l’horizon. Il ne pouvait distinguer le navire, qui se confondait avec la ligne grise et floue qu’il savait être la côte française. Il pointa à nouveau sa lunette et se mordit la lèvre. Là-haut, se balançant confortablement sur son perchoir vertigineux, la vigie devait voir clairement la frégate, et, plus important encore, la configuration des terres. Il prit sa décision.

— Je gagne les hauts, monsieur Inch.

Il ignora le rapide échange de regards, et se concentra entièrement sur sa lente ascension, dépassant d’abord les haubans puis les enfléchures.

Bolitho détestait les hauteurs depuis le temps où il était aspirant. Chaque fois qu’il avait été contraint d’escalader le gréement, il avait espéré dominer cette peur stupide. Mais il n’en était rien, et, serrant les dents, le regard constamment fixé sur le sommet du mât, il continuait à progresser toujours plus haut. Il atteignit la grand-hune, surprenant deux fusiliers occupés à nettoyer une couleuvrine, et se pencha au-dessus du vide, accroché aux gambes de revers, serrant les dents encore davantage pour ne pas vomir. Car, avec tous ces regards fixés sur lui plus encore que sur la frégate en approche, il ne pouvait se permettre d’emprunter le trou du chat.

Quand enfin il atteignit les traversières, il fut accueilli par un matelot à catogan d’un certain âge, qui s’écarta pour lui permettre de s’asseoir. Bolitho, n’ayant pas encore repris son souffle, le remercia d’un signe de tête. Il resta quelques instants appuyé contre le mât qui vibrait, essayant, sans regarder en bas, de saisir la longue-vue qu’il portait en bandoulière. Il entendit l’aspirant Gascoigne crier :

— La frégate a envoyé le signal de reconnaissance, commandant.

Inch devait avoir donné un ordre car, quelques secondes plus tard, le pavillon donnant l’aperçu monta à la grand-vergue. Bolitho pointa sa longue-vue sur la frégate qui se rapprochait rapidement, son étrave fendant l’écume. Il en oublia son inconfort en se remémorant le temps passé sur ce type de navires. Toujours en alerte, avec ce sentiment de vitesse et d’excitation que seuls ces gracieux bâtiments peuvent susciter. Il se surprit à plaindre le commandant pour sa présente mission : tirer des bords, jour après jour, sans jamais rien à se mettre sous la dent. C’était déjà suffisamment insupportable sur un navire de ligne, mais avec une carène de cette finesse, cela devait être un véritable cauchemar.

Il détourna lentement sa lunette et balaya la langue de terre au nord de l’estuaire. Il aperçut quelques taches blanches, probablement des maisons de gardes-côtes. Sous l’effet du courant littoral, elles semblaient se déplacer et la mer rester immobile. Il abaissa sa longue-vue et s’essuya l’œil d’un revers de manche. Il entendit la voix d’Inch portée par le vent :

— Commandant, l’Ithuriel n’a rien à rapporter.

Momentanément gêné par le faseyement du hunier de misaine, Bolitho fixa du regard les silhouettes minuscules sur la dunette et les visages qui formaient de petites taches blanches sur le pont usé. Il pouvait voir Gascoigne, son livre de signaux claquant au vent, et Stepkyne, sa longue-vue pointée sur la frégate qui courait à contre-bord. Le navire lui-même paraissait petit et ramassé, au point qu’il était difficile d’imaginer que sa large coque pût abriter six cents âmes. Il pensa aux conditions difficiles que connaissait la frégate : simple élément d’un cordon de navires, battu par les vents et ne pouvant compter que sur lui-même, et cependant essentiel si l’on voulait contenir l’ennemi dans ses ports.

Bolitho avala sa salive et saisit un galhauban. L’idée de redescendre lui était insupportable. Aussi, s’accrochant aux traversières, sous le regard effaré de la vigie, il se laissa glisser jusqu’au gaillard d’arrière en retenant sa respiration. De cette façon, moins digne mais plus rapide, il reprit pied sur le pont en haletant. Conscient des sourires des matelots autour de lui et de la douleur causée par le frottement de l’étai qui l’avait meurtri à travers ses vêtements, il dit d’un ton rogue :

— Avant la nuit, j’enverrai un signal à l’Ithuriel.

Il fit un signe à Gascoigne :

— J’ai oublié le nom de son commandant.

Gascoigne, toujours sidéré qu’un commandant puisse se comporter de la sorte, ouvrit son livre et bredouilla :

— Ithuriel, trente-deux canons, capitaine de vaisseau Curry, commandant.

Bolitho songeait que ce serait banal de lui souhaiter une bonne année, mais c’était toujours mieux que rien.

— Eh bien, ils l’ont gardé assez fringant, malgré ce foutu temps, commenta Stepkyne.

Bolitho prit le lourd télescope de signalisation de Gascoigne et le leva par-dessus le bastingage. La frégate se trouvait maintenant par le quart bâbord arrière de l’Hyperion, et il pouvait distinguer l’équipage assemblé sur sa poupe, sous le pavillon en lambeaux. Il cligna des yeux rapidement pour chasser la fatigue. Il se trompait. Il ne pouvait en être autrement. Sa voix était toujours calme lorsqu’il ordonna :

— Envoyez ce signal, monsieur Gascoigne : « Hermes à Ithuriel. Bonne chance. »

Il ignora le regard stupéfait qui s’inscrivait sur le visage de l’aspirant et reprit d’une voix âpre :

— Vous avez bien entendu. J’ai dit Hermes !

Puis il ajouta :

— Merci, monsieur Stepkyne.

Personne ne dit mot. Ceux qui se tenaient à côté de Bolitho détournèrent le regard, ne supportant pas d’être témoins de sa folie.

— Il a fait l’aperçu, commandant, annonça Gascoigne d’une petite voix.

Bolitho regarda au loin.

— Amenez-le tribord amures, monsieur Gossett. Nous gouvernerons plein ouest.

Alors que le sifflet du bosco retentissait et que les hommes couraient vers les manœuvres, il ajouta sèchement :

— L’Ithuriel est une frégate de trente canons, messieurs, ce navire-là en compte trente-six. De plus, seul un Français ne verrait pas que nous ne sommes pas l’Hermes !

Tous le regardaient sidérés !

— Monsieur Stepkyne a été le premier à le remarquer, même s’il ne s’est pas immédiatement rendu compte de ce qu’il avait découvert. Cette frégate est bien trop fringante et trop propre après des semaines de blocus !

— Qu’est-ce que cela signifie, commandant ? lâcha Inch, interloqué.

Bolitho contemplait le balancement des vergues et les voiles gonflées par le vent.

— Cela signifie, messieurs, que l’Ithuriel a été pris !… et explique pourquoi ces gens connaissaient nos signaux de reconnaissance.

Il était parfaitement calme, et cela le surprenait lui-même. Il vit Allday appuyé contre un canon de neuf, observant la frégate qui glissait par l’arrière dans un nuage d’écume et disparaissait dans la nuit. Lui savait ce que ressentait Bolitho. Il s’était trouvé à bord de la Phalarope quand elle avait été attaquée par ce corsaire américain. Là aussi, il s’était agi d’une frégate britannique capturée par l’ennemi.

— Selon vous, demanda posément Bolitho, pourquoi les Français se donneraient-ils tant de mal ? Ils avaient pris une bonne frégate, alors pourquoi s’en dissimuler ?

— Il me semble qu’y z-ont quequ’chose à cacher ! avança Gossett.

Bolitho eut un large sourire.

— Je le crois, monsieur Gossett.

Il regarda la flamme claquant au vent.

— Nous n’avons pas le temps d’informer l’escadre, même si on pouvait la trouver.

Son ton se fit plus dur.

— Dès qu’il fera nuit, nous virerons de bord pour prendre position au nord de l’estuaire. Je suis sûr que le commandant de la frégate, quel qu’il soit, mouillera pour la nuit. Il doit savoir qu’il est fort peu probable qu’un autre bâtiment de l’escadre nous rejoigne avant des jours, peut-être même des semaines.

Il essaya de cacher son amertume. Si Pelham-Martin avait concentré ses trois frégates, et éventuellement les sloops, en arc de cercle autour de la zone de patrouille, à portée de vue les uns des autres, cela ne serait jamais arrivé. Il poursuivit d’un ton plus neutre :

— Nous nous rapprocherons de la côte autant que possible. Quand le jour se lèvera, je veux être au vent de l’Ithuriel.

Il regarda froidement les carions les plus proches.

— Cette fois-ci, je parlerai le premier, et fermement.

Alors que des nuages se rapprochaient et plongeaient l’océan dans une totale obscurité, Bolitho faisait toujours les cent pas sur la dunette. Les embruns l’avaient trempé jusqu’aux os, mais il ne s’en rendait même pas compte. Il revoyait la frégate, ressentait l’arrogance de son commandant lors de l’échange des signaux. Et cela avait été si près de réussir ! Il fulminait de rage. Quelques instants de plus, et ils se seraient séparés. L’Hyperion aurait informé le commodore qu’il n’y avait rien d’inhabituel à rapporter, et ce dernier aurait été trop content de s’en tenir là.

Et la frégate ? Bolitho s’arrêta brusquement, à la grande inquiétude du timonier qu’il fixait sans même le voir. Son commandant pourrait informer ses supérieurs que les Anglais étaient tombés dans le piège. Il fronça les sourcils. Mais dans quel but ? Il continua à arpenter son domaine, totalement absorbé dans ses pensées.

D’une simple bordée, même mal ajustée, l’Hyperion aurait pu démâter la frégate lorsqu’elle était à contre-bord. Que se passerait-il si, l’aube venue, elle ne se trouvait plus dans sa zone de patrouille ? Pelham-Martin n’aurait même pas la satisfaction de savoir qu’un bâtiment ennemi avait été détruit, quand il écrirait à Cavendish pour l’informer de la capture de l’Ithuriel. Pelham-Martin ne serait nullement enclin à accepter seul la responsabilité de cette perte, se dit Bolitho en grimaçant. Mais il devait y avoir une raison au comportement des Français. Il ne pouvait en être autrement.

Au bout d’un temps, éreinté et gelé, il dit :

— Je serai dans ma cabine, monsieur Stepkyne. Appelez-moi une demi-heure avant le branle-bas, s’il vous plaît.

Il prit Inch par le bras :

— Faites savoir que je veux l’équipage réveillé à ce moment-là. Les hommes devront avoir mangé et être parés à toute éventualité quand le jour pointera.

Comme il avançait dans l’obscurité vers la poupe, il entendit une voix admirative murmurer :

— Solide comme un roc, çui-là ! Y voit un foutu mangeur de grenouilles sous ses canons et y bouge pas un cil !

Puis la voix de basse de Gossett :

— Boucle-la, vieux jacasseur. T’auras tout l’temps de faire du bruit quand les canons commenceront à te caresser les oreilles.

Bolitho pénétra dans sa cabine et claqua la porte. Pendant quelques instants, il resta immobile, adossé à la cloison, regardant sans les voir les lanternes qui se balançaient.

Gossett avait parfaitement raison. Moins d’un quart de l’équipage avait déjà embarqué, et moins nombreux encore étaient ceux qui avaient essuyé le feu de l’ennemi. Il ferma les yeux et essaya de chasser le doute de son esprit. Il n’avait pas le choix, il ne l’avait d’ailleurs plus depuis l’instant où il avait percé à jour la ruse de la frégate.

Et le pire, c’était que le piège avait bien failli fonctionner ! Malgré toute son expérience et son entraînement, il n’avait vu que ce qu’il s’attendait à voir. Le commandant de la frégate avait compté sur cela, mais il devait connaître les conséquences d’un échec. Chaque minute avait dû lui paraître une heure, depuis le moment où l’Hyperion avait surgi à deux milles de lui.

Quel que fût le dessein des Français, cela devait en valoir la peine. Cette pensée eut le don de le rasséréner, et lorsque Petch se glissa à pas feutrés dans la cabine avec du café, il trouva Bolitho endormi, allongé sur la banquette d’étambot, les traits sereins. Petch était une âme simple, et quand il confia à certains de ses camarades que le commandant avait une telle confiance en lui qu’il était déjà profondément endormi, l’anecdote n’en prit que plus d’importance.

Allday écouta l’histoire et ne dit mot. Il connaissait Bolitho mieux que quiconque, et devina que, comme lui, il s’était rappelé que le même stratagème avait failli lui coûter la vie et son navire, il y avait de cela un joli nombre d’années.

Allday examina son sabre à la faible lueur d’une lanterne sourde. S’il devait y avoir un combat, l’assurance seule ne suffirait pas aux jeunes recrues de l’Hyperion. Il en faudrait bien davantage !

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